Depuis le début du XVème siècle, le sacre a cessé de créer la légitimité du roi. Il ne fait plus que confirmer la légitimité de celui-ci, car comme on le dit si bien « Un prince saisi de plein droit par la succession à la couronne » (Ferrière)
Le peuple français, toujours attaché aux fastes des cérémonies, au beau, était très attaché à cette belle cérémonie du sacre. Que dire de Jeanne d’Arc, allant jusqu’à pratiquement forcer le dauphin à se dépêcher d’aller à Reins pour le sacre, le « gentil Roi » devait être sacré depuis sept ans.
Le sacre ne fait pas le roi !
Dès la mort de son prédécesseur, comme nous le rappel la formule de nos pères - « le roy est mort, vive le roy » - le roy de France, est pleinement Roi, ayant une légitimité parfaite.
« le serment prêté sur les évangiles, l’onction et le couronnement par l’archevêque de Reims, double sa légitimité juridique et politique d’une légitimité religieuse, aussi importante que les autres aux yeux des peuples du royaume, car d’une part, celui en qui s’incarnait la royauté, s’enracinait ainsi dans l’histoire et dans les mythes fondateurs de la nation et, et d’autres part, revêtait un caractère sacré : il est désormais l’oint du Seigneur, à qui les fastes de Reims conféraient la qualité insigne de roi thaumaturge, guérisseur des écrouelles. (M. Antoine)
Reims
Le sacre est très souvent célébré à Reims, mais l'exception confirmant la règles ce n'est pas toujours le cas. Hugues Capet a été sacré à Noyon en 987, ou Henri IV a été sacré en 1594 à Chartres, et d’autres encore ! Le sacre est le plus souvent célébré à Reims en référence à Louis I le pieux qui choisit de se faire sacrer dans cette ville (il est le premier), lui-même en référence à Clovis, baptisé dans cette même ville. Clovis se traduisant en français par Louis ! Celui-ci avait été baptisé en 498 (et non 496) par St Remis, évêque de Reims. Le sacre se déroule aussi à Reims, parce que Hincmar, archevêque de Reims, avait laissé croire en 869, que Saint Remis, juste après le baptême de Clovis, l’avait aussi sacré et oint !
La sainte Ampoule
Le premier Roi franc sacré, est Pépin le bref, par Saint Boniface en 751 et en 754 par le pape. On pense que l’huile de ce premier sacre fut celle du baptême de Clovis, « envoyée du ciel dans la Sainte Ampoule » (Ferrière) par l’intermédiaire d’une colombe, venue se poser sur l’autel même de l’église. C’est d’ailleurs pour l’une de ces raisons, que la France fut nommée, sacrée, fille ainée de l’Église. Et selon Charles le chauve, « La Sainte Ampoule est un flacon rempli d’une huile d’odeur suave, apporté le jour du baptême de Clovis par une colombe ».
Celle-ci se trouve actuellement à Reims, au palais de Tau. Le 7 octobre 1793, le conventionnel Rhül, brisa la sainte Ampoule en place publique, mais quelques parcelles en furent récupérées. Elle est donc toujours prête à son office !
Sur le pied du calice du sacre, une inscription gravée sans doute postérieure au XIII siècle jette l’anathème sur quiconque ferait sortir de la cathédrale ce calice. La formule latine a fonctionné puisqu’il échappa aux fontes révolutionnaires, ce qui ne fut pas le cas de sa patène ! Et de la Sainte Ampoule !
Le sacre un « huitième sacrement »
Il y a eu plusieurs sacres différents, Henri IV fut sacré à Chartre, à l’âge de quarante ans, et Louis XIII à neuf ans ! Louis XIV à 15 ans, et Louis XVI dans une situation un peu théâtrale selon certaines sources. Le roi reçoit son pouvoir de Dieu, comme le rappel Jeanne d’Arc en 1429, s’adressant au dauphin, « Le Roy du ciel vous fait savoir par moi que vous allez être sacré et couronné dans la ville de Reims et que vous serez son lieutenant à lui qui est le vrai Roy de France »
Le jour du sacre de Louis XVI, au moment de la proclamation du roi, « Chacun sortait de sa place, et les cris, les fanfares, les battements de mains, faisaient qu’on n’entendait plus rien, pas même le Te Deum » (Croy)
En général le roi venait à Reims en avance, ainsi que les regalia (Les ornements, les emblèmes, les insignes royaux qui servent lors de la cérémonie du couronnement. Ces objets représentent les symboles de la royauté, et chaque monarchie a ses propres regalia conservés avec beaucoup de soins ; ces signes distinctifs permettent d’assurer la légitimité du roi de France) conservés à Saint Denis. (Sceptre, diadème, main de justice, camisole, sandales, bottines, manteau du sacre, dalmatique, tunique, éperons, épées ...). La cérémonie était célébrée le dimanche.
Le serment du sacre
Pendant la cérémonie, le roi doit prononcer les serments du sacre ;
-la promesse « canonique » de protéger les libertés et immunités des gens d’Eglise.
-le serment du « royaume » : devant Dieu, le roy jure d’accorder la paix, la justice et la miséricorde à ses peuples (il ressemblait au psaume 85)
-l’engagement solennel d’extirper les hérésies
Ensuite, le Roy baisait l’Evangile.
Le serment, datait du XIIIème siècle, ne parut pas embêter Henri IV (4 ans avant l’édit de Nantes)
L’onction et la remise des insignes royaux
Après le serment, arrive la remise des éperons d’or et la bénédiction de l’épée royale, celle de Charlemagne ! « Que le Roi réprime les orgueilleux, qu’il soit un modèle pour les riches et les puissants, qu’il soit bon envers les humbles et charitable envers les pauvres, qu’il soit juste à l’égard de tous ses sujets et qu’il travaille à la paix entre les nations. » Puis la tunique et sa dalmatique, le manteau violait semer de fleurs de lys. « Les lis justifient l’alliance de la France et de Dieu » (Colette Beaune).
Puis l’archevêque remettait l’anneau, l’anneau, le sceptre, la main de justice et la couronne. Le Roy montait sur le trône et reçois l’hommage des pairs de France. Les portes de la Cathédrale, au cri du « vivat Rex in Eaternum »
Et la foule envahissait la cathédrale et suivait le Te Deum, la messe et la communion. D’autre cérémonie suivait la messe, comme la réception des insignes de l’ordre du Saint Esprit et le touché des écrouelles.
Guibert de Nogent, proche de Louis VI, a assisté au rite au début du XIIème siècle :
« J’ai vu de mes propres yeux des malades souffrant d’écrouelles au cou, ou en d’autres parties du corps, accourir en foule pour se faire toucher par lui. Le roi montrait envers eux sa générosité innée ; les attirant de sa main sereine, il faisait humblement sur eux le signe de croix. » (Guibert de Nogent)
A suivre : « les rois thaumaturges »
Vianney C / Antoine de Montjoie
Rédacteur en chef de l'UFUR
Président du CREF
Source : Journal Une France Un Roy n°6, "Le sacre des Rois de France" Vianney C
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